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Tous les genres littéraires

D. MORRESI

Poésie

Ero attratto da zone morte impercorse, sul cui fondo si raccoglieva il putrido di scarti dal lucore di gemme. Me ne impastavo le mani e ne respiravo a pieni polmoni il fetore, triste e grato dello sfacelo d’ogni cosa J’étais attiré par les zones mortes inexplorées, au fond desquelles s’amassait la pourriture de déchets aux lueurs de gemmes. Je m’en couvrais les mains et j’en respirais à pleins poumons la puanteur, triste et reconnaissant de la décadence de chaque chose

*** Un giorno ho avuto liberi i polsi i vincoli che li stringevano si sono sciolti. S’intonavano le mie labbra alle movenze dell’aria Un jour j’ai eu les poignets libres les liens qui les enserraient se sont dissouts. Mes lèvres s’accordaient aux mouvements de l’air

*** Sono venuto qui per il respiro della stanza a migliaia di chilometri dall’ultimo saluto. Una casa galleggiante sul tempo indefinito dell’acqua il tè che mi portano è silenzioso distendo lo sguardo sulle cose vicine, su quelle lontane, avanti e indietro non cerco l’illuminazione. Il respiro di una stanza Je suis venu ici pour la respiration de la pièce à des milliers de kilomètres du dernier salut. Une maison flottante sur le temps indéfini de l’eau le thé qu’ils m’apportent est silencieux j’étends mon regard sur les choses proches, sur les lointaines, en avant et en arrière je ne recherche pas l’illumination. La respiration d’une pièce

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A. PONCIONI

Poésie

S’è spento il vento. Sul piano inclinato del tempo con i suoi poveri cristi a bordo rotola il treno verso una stazione. Srotola il trillo del merlo il suo messaggio che cade dentro la sacca del silenzio. Le vent s’est éteint. Sur le plan incliné du temps avec ses pauvres diables à bord le train roule vers une gare. Le trille du merle déroule son message qui tombe dans le sac du silence.

*** Qui nella chiesa del paese di montagna il gregge di vecchiette, già folto, è ormai sparuto e la volta non rimanda quei salmi d’un tempo densi di voci. Quiete le superstiti accolgono l’incenso verbale dalle livide labbra di una sorta di frate, che chiama a raccolta la cristianità a far da diga alla calamità: l’aborto, di cui non già i tormenti, bensì, dalle sacre are, la legalizzazione si deplora. Tra un pater, pretesto, e un’ave, scusa, il santo verbo dei vescovi svizzeri enunciato in una predica affannosa. Ici dans l’église du village de montagne le troupeau de petites vieilles, jadis compact, s’est fait chétif et la voûte ne renvoie pas ces psaumes d’antan, denses de voix. Les survivantes accueillent, paisibles, l’encens verbal d’une sorte de frère aux lèvres livides, appelant la chrétienté en renfort contre la crue du fléau : l’avortement, dont on déplore depuis les autels sacrés, non pas les tourments, mais la légalisation. Entre un Notre Père, prétexte et un Je vous salue, excuse, le saint verbe des évêques suisses s’énonce en un sermon essoufflé.

*** Come dimenticare l’esile tua vita che si insinuava nel mio abbraccio? Come dimenticare le brune voglie sul tuo ventre teso? E la mia voglia, disteso sul tuo ventre? Come scordare l’invito dei tuoi fianchi, sponde d’acque primeve? E i tuoi piccoli seni, pieni e succosi, e l’effluvio di dolcezza che dicevi, la testa quieta sul mio grembo? Comment oublier ta taille fine qui se glissait dans mon étreinte ? Comment oublier les brunes envies sur ton ventre tendu ? Et mon envie, étendu sur ton ventre ? Comment oublier l’invitation de tes hanches, berges d’eaux primordiales ? Et tes petits seins, pleins et juteux, et l’effluve de douceur que tu disais, ta tête paisible sur ma poitrine ?

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C. MONGODI

Poésie

La carta assorbe l'estate e i corpi d'alunni e insegnanti. Di carta i denti della scuola, le sue voraci mandibole, i suoi muscoli. Vince chi sa destreggiarsi con lei come un giocoliere, chi sa canalizzarne i flussi in ordinate gerarchie. Le papier absorbe l'été et les corps des élèves et des enseignants. En papier, les dents de l'école ses voraces mandibules, ses muscles. Gagne qui sait le manoeuvrer tel un jongleur, qui sait en canaliser les flux en hiérarchies ordonnées.

*** Ci appare quasi sempre già bell'e scritta. Ci restano il margine o il fondo delle copie per aggiungere commenti e spesso ai nostri alunni domandiamo ciò che già sappiamo. Come insegnare perché ridiventi per loro e per noi terra foglia e orizzonte? Il vient à nous presque toujours déjà écrit. Nous restent la marge ou le bas de la copie pour ajouter des commentaires et souvent nous demandons à nos élèves ce que nous savons déjà. Comment enseigner afin qu'il redevienne pour eux et pour nous terre feuille et horizon ?

*** Rieccoti alla cattedra dentro un gorgoglio di punti di domanda che vela a malapena l'irrequietezza dei tuoi venti compagni. Ogni mia obiezione che ti scrolli di dosso è un sasso che piomba su di loro affilandone i mormorii. Di colpo siamo nel centro d'una sfera protetti da ogni interferenza: «d'accordo, Zoé, ti alzerò il voto», ma forse tu volevi solo farmi leggere qualche sillaba dei graffiti incisi sotto la tua pelle. Te revoici au pupitre campée dans un gargouillement de points d'interrogations qui voile à peine l'effervescence de tes vingt camarades. Tu t'ébroues à chacune de mes objections les faisant tomber sur eux tel un caillou qui affûte leur brouhaha. Soudain nous sommes au centre d'une sphère protégés de toute interférence: «d'accord, Zoé, j'augmenterai ta note», mais peut-être que tu espérais seulement me faire lire quelques syllabes des graffiti gravés sous ta peau.

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I. MIZRAHI

Récit

Il vaut mieux parfois commencer une histoire par la fin. Une fin qui n’en est pas une puisqu’elle n’a pas été décidée, ni même pensée. Une fin ouverte, une fin sans point, une fin pourtant puisqu’il n’y a pas de suite, quand chaque jour enchaîne ses perles d’oxygène sur le collier du temps, un temps élastique, un temps sans repères, sans suspension, sans ce souffle contrasté, sans paravent de fumée, sans cette cigarette dont je pense ne jamais pouvoir me passer. Sous mes yeux je te regarde te suicider, mé­thodique­ment, te consumant dans des volutes de mots divins que tu lances au bûcher, avec cette élégance désenchantée du funambule, qui, pour la beauté du geste, risque sa vie à chaque inspiration, jetant au sol comme on jette les cendres, les feuilles de tes textes habités. Entre tes doigts, toujours, cette lumière incandescente telle un phare pour éclairer ta nuit. * Je n’ai jamais été une grande fumeuse. Invétérée oui, mais tempérée, sans excès ou si peu, une fumeuse métronomique et modérée. Je fume, par habitude ou par plaisir, l’une et l’autre se plaisent à se confondre. Et de cette fusion naît le rituel, et du rituel, le lien mortel. C’est une histoire de cadence, de densité de l’instant où l’arrêt marque l’image, vingt-quatre images seconde que l’on peut suspendre pour inhaler une illusion. Il suffit d’une allumette. On savoure la parenthèse, on repousse l’aveu de détresse à plus tard. Trop tard sans doute. Mais qu’importe, on ­les enchaîne. Elles nous enchantent. Elles nous consument. Celle du matin d’abord. Une tasse de café brûlant, la fenêtre ouverte de la cuisine sur le théâtre du jour dont je me préserve encore. Assise sur le rebord du monde, je n’ai aucune envie d’elle, mais je l’allume machinalement pour me mettre en mouvement. Elle est ma chorégraphe, ma menteuse délicieuse, ma baguette de chef d’orchestre, celle qui dicte le tempo de la journée en entamant la partition par une pause. Avec elle, on n’est jamais à court de contradictions. Tu le sais mieux que personne, mon double, mon trouble, mon ami le poète louvoyant. Tu le sais mieux que personne et tu t’en fous… tu t’en amuses entre deux quintes, tu t’esquintes pour le plaisir de dire que tu t’en fous. Le battement des heures, comme celui du cœur, s’accélère un peu juste après midi, au moment du dernier café. Nectar d’amertume tant attendu pour accompagner celle à laquelle j’aspire, que j’inspire et expire et pire encore. Je m’en délecte. Jamais je ne saurai m’en priver. Je pense, quand j’y pense. Trop privé. Le moment m’appartient, je le jalouse, il est mien et ne serait rien sans mon amie, sans ma béquille, sans cette tige de papier chic et de tabac tassé. Le monde deviendrait bancal, navrant, éteint. J’étreins un peu plus fort ma tasse de café, tire un peu plus fort sur ma cigarette, satisfaite, je peux l’éteindre jusqu’à la prochaine. Au spectacle de chaque mégot écrasé, un léger dégoût m’ôte le goût de l’instant passé, mais la musique de mes jours est ainsi rythmée. Le désir puis le dégoût, l’un l’autre se substituant dans une danse magnétique ­de balancier. Alors que la journée verse déjà sa lumière dans le soir, l’étranger ou l’ami, à ma table ou celle d’à côté, crée une bulle de vapeur bleutée et de confidences soufflées. Les gestes s’imitent en miroirs éthérés, on partage, c’est délicieux, on revendique notre hédonisme en remplissant le cendrier. Quelque part dans la ville, tu contemples un monticule de cendres et le monde n’est que fumée au travers de laquelle tu distingues des déesses, inaccessibles et vaporeuses. Alors parfois, il vaut mieux commencer une histoire par la fin. Une fin qui n’en est pas une puisqu’elle n’a pas été décidée, ni même pensée. Une fin ouverte, une fin sans point, une fin pourtant puisqu’il n’y a pas de suite, quand chaque jour enchaîne ses perles d’oxygène sur le collier du temps, un temps élastique, un temps sans repères, sans suspension, sans ce souffle contrasté, sans paravent de fumée, sans cette cigarette dont je pense ne jamais pouvoir me passer. Et pourtant…

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